Les indicateurs du pouvoir d’achat
L'Expression le 19 Avril 2008
Sait-on vraiment de quoi on parle lorsqu’on aborde le pouvoir d’achat des Algériens? Avant de vouloir le quantifier, il faut pouvoir le mesurer. Or, dans un pays où l’économie informelle se taille la part du lion, où l’argent transite par tous les circuits sauf celui des banques, où les travailleurs non déclarés sont légion, où la fraude fiscale a rompu toutes les digues tant elle est massive, où..., où...établir des statistiques fiables relève de la même veine que prévoir avec exactitude un tremblement de terre. Ceci en admettant que l’outil statistique soit bien maîtrisé. Ce qui n’est pas encore le cas.
A défaut, il reste ce qui est visible à l’oeil nu. On assiste à l’explosion du marché de l’automobile. La téléphonie mobile a eu un développement fulgurant. Une téléphonie qui engrange des milliards et des milliards pour ses recharges. L’an passé, les Tunisiens ont affirmé avoir reçu un million de touristes algériens. Les constructions individuelles licites ou non, sont devenues banales. Dans la rue, bien malin celui qui parviendra à distinguer, par l’apparence, le pauvre du riche.
Les chaussures pour enfants à 8000DA se vendent comme des petits pains. La profession des ramasseurs de pain rassis pour sa revente aux éleveurs de volailles est très prospère. Les cliniques privées poussent comme des champignons. Les lignes intérieures de notre compagnie nationale sont prises d’assaut par des passagers qui ne regardent pas outre mesure à la dépense. Etc., etc.
Ceci ne veut pas dire que tous les Algériens sont riches. Ou qu’il n’y a pas de pauvres parmi nous. Mais ceci veut dire, au moins qu’en Algérie aujourd’hui, personne ne meurt de faim. Pas un cas, pas un seul n’a été signalé. Tant mieux pour nous et tant pis pour tous les charognards qui font semblant de pleurer le sort des Algériens en se proposant de défendre leur pouvoir d’achat.
Qu’ils aillent chanter leur «mélodie» ailleurs (à Cuba par exemple) et qu’ils cessent de nous prendre pour des marchepieds pour atteindre et faire de la politique. Qu’ils aillent dire à travers le monde que même le pain des milliardaires est subventionné. Leur lait. Leur pomme de terre. Leur rond à béton. Il y a énormément d’Algériens, comme nous, qui sont contre une telle généralisation de l’aide. Aucun pays au monde, soit-il le plus riche comme les Etats-Unis ou la France, «n’engraisse» comme nous ses richards.
Dans ces pays-là, monsieur, il y a des pauvres. Ils crèvent de faim. Ils sont connus. Leur nombre aussi. Dans ces pays-là, monsieur, le temps aidant tout est inventorié, répertorié, organisé. A ces pays nous serions tentés de paraphraser cette célèbre répartie: «Donnez-nous votre temps et nous vous refilerons nos politicards.» Des politicards qui feraient mieux de trouver autre chose que le pouvoir d’achat pour se faire une place au soleil.
Zouhir MEBARKI
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